samedi 30 août 2014

LE CANAL DE PANAMA

PORTOBELO 




Je suis de nouveau mouillé à Portobelo, tout au fond de la rade.




Devant moi passent des pirogues.
Elles filent vite sans faire de vagues.




Je suis mouillé près de la zone de pêche des villageois.



Ils lancent l’épervier depuis ces embarcations à stabilité plus réduite qu’une planche à voile



Le dimanche, c’est la pêche en famille. Avant 5 ans, pas de ligne ni d’hameçon. Pour jouer, il y a les poissons fraîchement sortie de l’eau et qui bougent encore. Les vêtements du dimanche seront à laver.
 Le village est plus calme : nous sommes en juillet, c’est la saison des pluies.





La place du centre-ville est pratiquement vide, le kiosque déserté,
 La circulation est fluide,




Il reste de la place sur le banc pour attendre le bus.



Il pleut tous les jours. Parfois il pleut très fort et longtemps, la mer prend alors la couleur de la terre.
Le Capitaine n'aime pas la pluie.
Tout est entrain de moisir dans mes coques.
Il faut changer d'endroit pour changer de climat.




Le 31 juillet, nous quittons Portobelo pour Colon, la ville d’entrée du Canal. Première étape du passage du Canal de Panama. 



Nous longeons la côte pendant 20 miles, dans un vent faible.




A l’approche de Colon, nous passons parmi les cargos sur rade extérieure



Puis nous passons le brise-lame par la petite entrée. Les vagues de l'Atlantique sont déjà derrière nous.








     Notre bilan Océan Atlantique :
  •         3 ans (moins deux mois)
  •         16650 miles
  •         116 jours de mer
  •         127 escales
     Ça m’a laissé (ainsi qu’au capitaine) environ 90 % du temps en escale.




COLON



La rade intérieure de Colon : il y a autant de navires en attente qu’à l’extérieur. Le capitaine ne les a pas compté, d’autant que les bateaux c’est comme les trains : un navire peut en cacher un autre.


Colon est la seconde zone franche au monde, derrière Hong Kong. Partout des quais, des grues et des portiques à conteneurs. Il serait possible de les compter : une grue en cache rarement une autre.



Nous rejoignons le Club Nautico. Je suis le seul voilier de passage : les autres sont à Shelter Bay Marina, très bel endroit mais isolé de la ville ... et du Panama.



Pendant quelques jours, j’ai ma place à quai. Ce qui permet de charger des vivres directement depuis le coffre des taxis.



La ville a la réputation d’être très dangereuse pour le touriste. Il y a quand même des quartiers tranquilles où Yves a été traîner ses baskets.



Il a pu voir les couchers de soleil sur les navires au mouillage depuis la terre ! 

Colon vu de la mer.
Les tours presque jumelles ont fait l’objet d’une attaque ; les terroristes n’ont pas trouvé d’avion, alors ils ont pris un bateau. L’attaque a échoué dans tous les sens du terme. … 
Je rigole, j’invente, je fabule.



Au milieu du giratoire du bout de l’esplanade, la statue du Christ règle la circulation.



Le Grand Hôtel Washington, fierté des habitants de Colon.




Le capitaine de ce caboteur y avait réservé une chambre et y est venu avec son bateau …



… mon capitaine s'y est rendu sans moi : le caboteur prend toute la place sur le parking.



Comme je vous l’avais annoncé, nous attendions un heureux événement.

Il est arrivé la veille du départ pour le passage du Canal : ce genre de choses, on ne les programme pas. 
Le papa se porte bien et ça se voit.


Le petit : il est blanc, mesure 3.30 mètres et pèse 52 kilos. 















Il est à voile et …

… à vapeur, comme moi. 
Mais il a une préférence pour la vapeur.




Son berceau était prêt. Il a rejoint la famille sous ses bossoirs. Le baptême sera pour plus tard.







PASSAGE DU CANAL DE PANAMA


Le passage du Canal est proche : je suis bardé de défenses et de pneus.
Un vieil ami me rejoint : « Idéfix », rencontré à Francisqui au Roques (Venezuela) il y a tous justes 2 ans. Depuis il a changé de propriétaire et d’équipage.





Le 6 août à 14h30, nous quittons le Club Nautico de Colon pour aller mouiller aux Flats, lieu de rendez-vous avec le pilote. 












Le capitaine voulait passer le Canal de 15 août, pour le 100ème anniversaire de l’ouvrage. 
Puis il a appris en consultant les archives que le 15 août est la date anniversaire de l’inauguration officielle du Canal. Des navires sont passés avant cette date : le remorqueur français, “Alexandre Lavalley” fut le premier à descendre les écluses vers le Pacifique le 7 Janvier 1914. Le vapeur français “Cristobal” avait également fait une pré-inauguration. Nous fêterons donc son centenaire le 6 août.




La réglementation du Canal impose la présence de 4 « hand-liner » pour passer les écluses. 
A mon bord, deux « professionnels » : Rey et Marcos …


… et deux « amateurs » : Yvonne qui assurera des repas panaméens pour tout le monde,



et son fils Israël, qui est à l'école navale. Ils n'avaient jamais passé le Canal. 
Leurs grands-parents / arrières grands-parents sont venus de Guadeloupe pour travailler à la construction du Canal. Comme tous les travailleurs de l'époque, ils sont ensuite resté au Panama : le voyage retour n'était pas prévu. 


A 17 heures, arrivé du pilote. Nous pouvons lever l’ancre et entrer dans le vif du sujet.



« Idéfix » est à mes côtés. Nous traversons la Bahia Limon, 


Devant nous, un navire sous pavillon des Etats Unis d’Amérique. Ce sera notre compagnon pour les trois écluses montantes.
Le programme du Canal de Panama : les trois écluses « Gatun » nous montent jusqu’au lac Gatun ; après avoir traversée le lac et le chenal de la Culebra, nous redescendons au niveau de la mer coté Pacifique par l’écluse Pedro Miguel et les deux écluses Miraflores.



Je m’approche de « Idéfix » avant de la première écluse.



Les équipages des deux catamarans s’agitent …




… et me voilà solidement accouplé à « Idéfix ».




Nous avançons ainsi : les deux capitaines se coordonnent pour que l’ensemble avance en ligne droite pour aller à l’endroit souhaité.



Ce n’est pas un match de base-ball mais ça y ressemble. Les hommes du Canal lancent les toulines pour que nous puissions passer nos aussières à quai.



L’Américain entre dans la première écluse ; il nous laisse un peu de place derrière lui. Il est 18h25.



Pilote et capitaine sont très attentifs lorsque ils me positionnent dans l’écluse.




Les portes commencent à se fermer sur l’Atlantique.


Ça y est, l'accès à Atlantique est clos. 

Pas de demi-tour possible : on n’a pas les clés de cette porte centenaire.




Puis c’est la monté de l’eau dans l’écluse.


Le Capitaine rigole mais jaune. Il a peur pour moi ?


C'est fait, je suis à 8 mètres d’altitude. Derrière la nuit tombe sur Colon.



Les portes entre la première et la deuxième écluse se referment derrière moi.


Il y a des temps morts dans cette navigation. Le Capitaine fait ses commentaires au skipper britannique de « Idéfix ».



Troisième et dernière écluse pour aujourd’hui. Il est 20 heures lorsque nous en sortons.


La nuit se passe sur un coffre situé 1,5 mile après les écluses. 
Détente après toutes ces émotions.









Deuxième journée




Le 7 août, le petit déjeuner est servi tôt : le pilote doit arriver à 7 heures.


Nous ne sommes pas les seuls à attendre le pilote.


Il arrive à 11h30. 
Aussitôt, le capitaine me mets en route aux moteurs : la voile est interdite sur le lac Gatun.

Comme sur toutes les routes fréquentées, il faut bien tenir sa droite. Pour moi, c’est facile ; c’est un peu plus difficile pour un anglais.


Sur le lac, les collines de la campagne panaméenne sont devenues des îles.



La bouée 44 : un cadeau du Conseil Général de Loire-Atlantique ?



Je mets 4 heures pour traverser le lac Gatún et la Culebra




L’équipage prend des forces,



Le Capitaine également, mais pas au poste d’équipage : il reste à son poste de commandement.



Les travaux pour l’élargissement du Canal sont en cours.



Les machines utilisées ne sont plus les même qu’il y a un siècle.



Le camion a remplacé le train à vapeur.


Nous sommes dans la Culebra : c’est ce perçage du canal au travers ces collines qui a tant freiné le projet l’époque.


Les restes d'une colline.
Un petit air Maya ce travail, non ?




Je suis talonné par un gros navire vert.



Lui-même suivi par un navire bleu.


Devant, le pont du Centenaire. Mes 17 mètres de mat passent dessous sans problème.




L’écluse San Pedro approche.
Les “hand-liners” vont se remettre au travail.



Visiblement, c’est le navire bleu qui sera notre compagnon d’écluse.




De nouveau, je suis accouplé à « Idéfix ».



A son bord, ce n’est pas encore l’effervescence, mais tout l’équipage se prépare.




A mon bord, tout est clair : je m’approche de l’écluse. Il est 16h30.




Il nous faut attendre que le navire précédent soit descendu.



Derrière moi, le bleu s’amarre pour attendre lui aussi.

Pousse pas ! J'avance


Et puis c’est notre tour.


Les toulines sont lancées, mes amarres sont prêtes pour me maintenir dans l’axe de l’écluse, aussi loin que possible des parois.



Ça y est, nous y sommes tous.





Et c’est la descente.



Quelques minutes plus tard, nous sommes 8 mètres plus bas.




Les « Hand-liners » ont tenus leur poste sans fumer. Mais la cigarette est prête.



Les portes s’ouvrent,



Les amarres sont larguées : 1 mile nous sépare des écluses Miraflorès.



Petit rappel au passage des 100 ans du Canal.


Il est difficile de distinguer l’avant de l’arrière des remorqueurs du Canal. Manière de mettre d'accord la marche avant et la marche arrière.


A Miraflores, nous sommes les vedettes d’un spectacle que le public regarde en dînant
En haut du bâtiment, une caméra.


Martine, la sœur année du Capitaine nous a vu depuis La Baule, en direct, à plus de 8000 kilomètres. 
Là, nous attendons d’entrer dans l’écluse.



Puis, toujours accouplé à « Idéfix », nous avançons dans l’écluse.



Ces écluses sont identiques à celles d’hier. Comme hier, la nuit tombe lorsque nous entrons dans la dernière écluse.


Yann, le fils du Capitaine, nous a également vu depuis Montpellier (on va dire 8000 kilomètres aussi). 
Nous étions également visibles aux USA, au Maroc, aux Philippines, en Thaïlande, … enfin une diffusion mondiale.









La dernière porte s’ouvre sur l’Océan Pacifique. 
Une autre histoire commence.









Finalement, le Canal de Panama, c’est comme une piqûre de rappel pour un vaccin : on attend le rendez-vous, ce n’est pas très douloureux … mais on se sent mieux quand c’est passé.